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16 octobre 2012 2 16 /10 /octobre /2012 07:24

De DAR ES SALAM à ADDIS ABEBA

 

AUTOMNE 2012

 

Mardi 2 octobre : La navette est à l’heure, un minibus conduit par un jeune très aimable. Nous devons aller chercher une autre passagère vers Tolbiac avant de prendre le périphérique encombré mais nous ne sommes pas pressés. Nous évitons la longue queue de l’enregistrement en nous présentant au guichet réservé aux cartes « silver » ou « gold » dont nous ignorons tout et qui ne sont probablement pas pour nous… La nuit tombe, Julie nous appelle quand nous sommes en salle d’embarquement, elle a découvert le chantier que j’ai laissé après la fuite d’eau à la machine à laver, révélée une heure et demie avant notre départ. Adieu téléphonique puis nous embarquons. Nous décollons avec trois quarts d’heure de retard et attendons impatiemment le dîner, servi sans apéritif… Nous visionnons chacun un film puis tentons de nous assoupir.

 

Mercredi 3 octobre : Le jour se lève sur la péninsule arabique, quelques lueurs signalent les puits de pétrole en mer. Dubaï sort de la brume et, après un bref survol du désert aux portes de la ville, nous nous posons. Nous traversons le mall, ce temple du luxe et de la frime avant de nous affaler dans des fauteuils et attendre l’heure du vol suivant. Nous somnolons en gardant un œil sur la pendule. Nous repartons avec encore un léger retard. Mais cette fois, nous avons droit à l’apéritif… que nous sommes dans les rares à prendre alcoolisé… Les autres passagers, dans leur très grande majorité, se contentent de jus de fruit ou de Coca Cola… Puis le repas, moment attendu et à peu près satisfaisant. Somnolence, sans parvenir à réellement dormir ni se reposer jusqu’à Dar es Salam. Le ciel est partiellement couvert mais la température est tout de même de 30°C. Nous devons faire une demande de visa, paperasserie et 50 dollars au bénéfice du Trésor tanzanien. Nous récupérons les sacs et retrouvons la moiteur des tropiques. Je tire des shillings puis nous nous laissons aborder par un taxi avec qui nous négocions la course au FPCT. Nous nous replongeons dans la circulation anarchique mais étrangement silencieuse, pas de musique, pas de coups de klaxon rageurs, pas d’invectives, même la lumière est terne, pas de couleurs, tout paraît grisâtre. On nous a volé « notre » Afrique ! Peut-être suis-je trop fatigué pour la voir et l’entendre. Après quelques slaloms entre les camions et les cars de transport locaux, nous retrouvons le FPCT. On nous reconnaît, je récupère la clé et je me précipite à la voiture. Las ! La batterie est à plat, le moteur n’a jamais tourné ! Celui qui nous a accueillis va chercher la clé d’un autre véhicule et, avec sa batterie, je parviens à démarrer le camion et le ramène devant le bureau. Nous décidons de prendre une chambre, 50000 shillings et non 50 dollars, comme nous l’avait fait payer ce petit malin de Charles ! Je mets notre batterie en charge et je commence à charger le camion avec nos effets. Message à Julie et à Nicole pour signaler notre arrivée, puis nous dînons sur les tables avec nos restes et des bières à peine fraîches avant d’aller récupérer de la fatigue du voyage dans la chambre climatisée.

 

Jeudi 4 octobre : Je suis réveillé avec le jour, Marie n’a pas encore pris le rythme... Je me lève à sept heures et repose la batterie mise en charge toute la nuit. La voiture daigne démarrer. Je vais faire le plein des réservoirs d’eau et doucher la voiture qui en a bien besoin. Un des vérins qui maintiennent le toit soulevé a rendu l’âme et je dois utiliser une béquille de bois pour le garder en position. Je commence à rapporter nos affaires et ranger dans les coffres. Marie s’éveille, je continue pendant qu’elle se prépare puis nous petit déjeunons. Je fais fixer les protections des disques de frein par un mécanicien du centre, puis je pars avec un taxi appelé par notre cher Charles, toujours aussi bègue et roublard. Je me fais déposer dans le centre et trouve aussitôt la compagnie d’assurance indiquée par Jean-Pierre. J’obtiens rapidement une attestation et une « carte jaune » qui nous couvre pour trois mois et pour tous les pays à traverser jusqu’à Djibouti. Je reviens par l’avenue Samora en cherchant le bureau de change le plus avantageux et enfin j’achète quelques provisions avant de rentrer en taxi au centre. Nous continuons de charger la voiture, je me douche et nous déjeunons avec des bières toujours pas fraîches, le réfrigérateur ne fonctionnant pas sous la charge des panneaux solaire seule. Après des adieux hypocrites à Charles qui a encore tenté de nous arracher des sous, nous quittons le FPCT. Nous cherchons le supermarché indiqué sur le site de T4Africa en utilisant le GPS et l’ordinateur. Les avenues sont toutes encombrées et, bus, tuk tuk, taxis n’hésitent pas à rouler sur les bas-côtés ravinés avant de se rabattre sans prévenir sur la chaussée. Nous n’avançons pas vite mais nous trouvons le supermarché, plutôt bien achalandé. Nous refaisons un plein de provisions et repartons en direction du nord, sur l’ancienne route de Bagamayo. La circulation est de plus en plus difficile, nous roulons au pas et les vingt kilomètres qui nous séparent de la plage où nous avons prévu de nous arrêter se font en plus d’une heure. Nous trouvons le Silver Sands Beach Hotel et son terrain de camping au bord de la plage. Nous y sommes seuls, les installations sont en complète décrépitude, quasi à l’abandon, mais on nous assure que le restaurant est ouvert. Nous commandons des plats pour sept heures et demie et étudions la carte pour essayer de programmer la suite en fonction de la date à laquelle nous devons retrouver Jean-Pierre au Kenya. Peu après sept heures on nous apporte les plats commandés. Nous nous récrions qu’il est trop tôt et que nous voulons dîner au restaurant ! Mais le restaurant n’a ni tables ni chaises ! On nous installe deux fauteuils en plastique branlants autour d’une table qui n’a pas été essuyée depuis sa fabrication et on nous rapporte les plats refroidis. Nous regrettons amèrement de ne pas avoir roulé jusqu’à Bagamayo… Nous avons fini de dîner à sept heures et demie et n’avons plus qu’à regagner notre camion. Le début du voyage n’est pas une réussite…

 

Vendredi 5 octobre : Très mauvaise nuit. Je ne parviens pas à me rafraîchir et transpire à grosses gouttes. De plus des moustiquesont osé s’introduire discrètement dans le camion et ne se privent pas de nous prélever leur repas préféré. Je rallume plusieurs fois, en tue un, bien gorgé de sang, et rate les autres. Je ne m’endors qu’au matin et nous nous levons plus tard que prévu. Marie réussit à se doucher dans la cabine réservée aux nains, à en croire la hauteur de la pomme de douche. Nous retournons sur la route principale par une route qui rappelle la Petite Côte sénégalaise : vastes étendues couvertes d’une mince couche de sel, proches de la mer d’où surgissent de rares cocotiers, baobabs et manguiers généreux. Les villages, quelques maisons et pour seuls commerces un débit de boisson racoleur, un marchand de matériaux de construction et une mosquée aux hauts-parleurs tonitruants, sont proches les uns des autres. La limitation à 50 km/h et surtout la peur des gendarmes nous demandent une bonne heure pour parvenir à Bagamoyo, une ancienne ville coloniale allemande, capitale éphémère du Tanganyika. Nous y trouvons sur la route qui longe le bord de mer quelques anciens bâtiments de cette époque. L’ancien centre administratif, le boma, est en restauration, caché derrière des palissades, nou201-BAGAMOYO-Fort.JPGs apercevons une imposante construction à deux étages avec des arcades très arabes autour des galeries. Quelques mètres plus loin, un ancien fort montre encore des murs épais et un bâtiment sans le moindre charme. Nous allons nous garer dans le centre de la ville ancienne qui se résume à deux rues parallèles et à quelques maisons décrépites, presque toujours avec des portes anciennes du style de celles de Zanzibar qui n’est qu’à quelques encablures au large. Elles mériteraient des travaux de restauration avant qu’elles ne s’écroulent et disparaissent à tout jamais.L’intérieur de l’une d’elles,abandonnée, présente de belles niches sur les murs intérieurs des pièces qui devaient être d214-BAGAMOYO-Ecole-Fete.JPG’apparat. Une petite fête est donnée par les élèves de ce qui fut la première école multi-raciale du pays à la fin du XIX° siècle, occasion de prendre des photos des femmes  et des enfants sans se faire rabrouer. Nous allons voir le marché au poisson désert à cette heure. Quelques marchandes font frire dans de grandes poêles posées sur des feux de bois, des poissons peu appétissants. Des boutres sont échoués sur la plage à marée basse. Des manœuvres en extraient des centaines de bidons d’huile de friture en provenance de Zanzibar. Je me vois reprocher de faire des photos mais si je paye je peux… Nous quittons Bagamoyo par une mauvaise piste qu’une pluie violente n’arrange pas. La voiture est vite recouverte de couches d’eau boueuse à chaque croisement de camions, que les essuie-glaces peu efficaces de Land Rover ne suffisent pas à balayer sur le pare-brise. Nous ne trouvons pas la piste directe qui nous aurait permis de rejoindre Pangani en suivant de plus ou moins près la côte mais nous avons une route en bon état et la pluie a cessé, le ciel va se dégager petit à petit. Nous traversons une brousse desséchée, la terre est dans l’attente des pluies bienfaisantes, les arbres sont font rares, il n’en reste que les souches. Les pauvres bougres qui transportent des sacs de charbon de bois sur leurs vélos en sont l’explication. Les malheureux peinent dans les montées et se font copieusement doucher dans l’orage. Nous quittons le goudron à Mkata pour une piste avec de mauvais passages, pris souvent trop vite, avec pour résultat de faire valdinguer vaisselle, grille du réchaud et tout ce qui n’est pas arrimé ! Les villages sont désormais des cases rectangulaires en « terre armée » et leur toiture une belle épaisseur de chaume qui descend presque au sol. Nous égratignons le parc de Saadani sans y voir d’autres espèces animales que des chèvres et des bovins. Les heures passent, le soleil baisse, je n’ai pas envie de rouler de nuit et nous arrivons juste à six heures et demie, à la nuit, au Beach Crab Resort. Nom pompeux pour un sympathique établissement, impeccablement tenu par un Allemand où nous pouvons nous installer sur la plage même, en compagnie de Suisses alémaniques pas du tout francophones. Nous allons nous offrir un gin-tonic au bar, peu de gin et beaucoup de tonic…Nous regagnons le camion, bien ventilé par l’air de la mer mais je peste contre le réfrigérateur qui a fonctionné tant que nous roulions et qui maintenant s’est mis au repos, les batteries à plat dès que nous nous arrêtons, et aussi contre tout ce qui ne va pas, le toit qui ne tient plus soulevé, etc… Purée périmée avec du lait limite et des saucisses boerwors sèches et nous sommes prêts à affronter une escadrille de moustiques…

 

Samedi 6 octobre : Encore des moustiques cette nuit, le répulsif emporté ne paraît guère efficace ! Je vais tout de même me tremper les pieds dans la mer, à quelques pas du camion. Des chaises longues nous invitent à y rester la journée mais le devoir l’emporte et nous repartons. Peut-être un jour, dans une autre vie, aurons-nous le temps de traîner ! Nous roulons au milieu des plantations de sisal que j’avais pris hier pour des champs d’ananas (géants !), quelques beaux flamboyants jettent des touches écarlates sur leurs longues 223-PANGANI-Estuaire.JPGfeuilles vertes. Nous atteignons le fleuve Pangani qui nous sépare de la petite ville du même nom. Avant de le traverser sur un bac, nous grimpons par une piste à un splendide hôtel au sommet de la falaise qui le surplombe. Une bâtisse d’allure coloniale, des bungalows élégants disposés sur une splendide pelouse anglaise où de grands arbres dispensent une ombre bienvenue, une piscine (sans eau) et un croquignolet mirador avec une vue sur tout l’estuaire, les bancs de sable en mer, les maisons sur l’autre rive. Il ferait bon y boire un gin-tonic installé là dans un confortable fauteuil mais l’hôtel est désert, pas un client, le propriétaire ne semble pas rechercher la rentabilité ! Nous traversons rapidement, le bac a failli oublier Marie qui a dû descendre de la voiture… Dans le village, quelques vestiges de maisons de l’époque allemande mais aucune n’est restaurée et l’intérêt est très limité, aussi continuons-nous de rouler. Les troncs227-PANGANI-Palmiers-doum.JPG de magnifiques palmiers doum se divisent à plusieurs niveaux avant que leurs palmes n’éclatent en bouquet de feu d’artifice. Nous faisons un petit détour pour aller voir les ruines arabes de Tongoni. Nous nous garons le plus possible à l’ombre, le soleil nous écrase de ses rayons. Surgit le gardien qui nous réclame 10000 shillings au lieu des 1000 du tarif des années précédentes. Nous ne nous prêtons pas à ce petit jeu des autorités qui augmentent les tarifs inconsidérément. Nous voulons déjeuner dans le camion, ce qui n’est pas du goût du gardien qui voudrait que nous payons pour stationner près du site ou que nous partions… Nous avalons rapidement notre repas avant de reprendre la route. Nous parvenons à Tanga, grande ville étendue, sans le moindre charme. Le quartier ancien, en bordure de la baie n’a pas grand-chose à offrir. Nous faisons une courte promenade dans le parc qui surplombe la baie, les bancs et les tables d’un kiosque sont occupés par d’oisifs citadins qui dégustent de rafraîchissantes salades de fruit. Nous reprenons la voiture et quittons la ville et l’océan indien, sur une bonne route goudronnée. Nous rejoignons le carrefour des routes de Dar es Salam et de Moshi et prenons en direction du nord. Le ciel s’est couvert, nous nous rapprochons des monts Usambara qui accrochent les nuages, la luminosité est mauvaise, il semble être plus tard qu’il n’est. La route s’élève puis une plus petite route se faufile dans des gorges où des jacarandas en pleine floraison piquent de taches mauves les flancs du ravin où des lopins de terre forment des damiers. L’habitat est dense et dispersé, les habitants sont plus chaudement couverts, nous sommes à plus de 1200 mètres d’altitude et la température devient vite plus clémente. Nous nous arrêtons à Lushoto, gros bourg, ancienne station d’altitude de remise en forme des cadres coloniaux. Nous nous installons sur une terrasse d’un hôtel établi sur une colline qui domine la petite ville, pas aussi confortablement que la veille et pour plus cher. Le menu du restaurant étant digne d’un mauvais snack de France, nous dînons dans le camion. Les sautes d’humeur du réfrigérateur n’ont pas permis aux côtes de mouton de résister aux écarts de température et elles parfument tout l’habitacle dès que nous en ouvrons la porte… Elles filent directement à la poubelle, nous nous contenterons d’œufs au bacon.

 

Dimanche 7 octobre : Il a fait assez frais pour que nous glissions dans les duvets cette nuit. Pour cause de samedi soir, des musiques très dansantes sont montées de la vallée toute la nuit. Marie a encore du mal à émerger… Les douches sont en triste état, sales, avec un filet d’eau brûlant ou glacial… Je fais re231-LUSHOTO-Marche.JPGmarquer au patron, un Blanc, le mauvais état de son camping et l’avertis qu’il n’aura pas ma publicité…Le soleil est présent et va jouer avec les nuages toute la matinée. Nous nous rendons au marché, plus animé le dimanche. Les paysannes, madras sur la tête, pagnes noués à la taille ou portés sur les épaules, abritées du soleil sous des ombrelles, venues des environs, ont étalé des petits tas de fruits et légumes, tomates bien rouges, gombos, cumbavas grumeleux, pommes de terre terreuses, avocats bruns, poivrons verts, oranges ternes, corosols épineux. C’est une débauche de couleurs ! Le marché couvert est moins239-LUSHOTO-Marche.JPG intéressant, bimbeloterie, quincaillerie clinquante, tas de chaussures usagées, poisson séché très odorant. Nous nous rendons ensuite dans un lieu de perdition, l’église catholique, apostolique et romaine où la messe est commencée. Nous prenons place parmi les fidèles, essayant de copier leurs gestes, debout, assis. Un chœur se balance au son d’une musique qui pourrait accompagner des airs de Claudette et Ti Pierre, rythmée par un harmonium et un tam-tam. Je tente de me rapprocher des chanteurs pour les filmer mais je me fais jeter par un diacre. Je reste dehors à observer le manège des enfants. Les plus petits tentent de grimper sur un vélo et salissent les chemises et pantalons propres enfilés pour ce dimanche, les autres s’ennuient, sortent, rentrent. Nous repartons et cherchons la piste tracée à flanc de montagne, dans une terre rouge, qui amène à un point de vue sur toute la plaine, plusieurs centaines de mètres en contrebas. La vue se perd dans la brume et les nuages qui la recouvrent ne permettent pas de forts contrastes. Nous repartons, déjeunons rapidement puis retrouvons la grande route de Dar es Salam à Arusha. Nous roulons à bonne allure entre la plaine masaï à l’ouest, couverte d’une brousse desséchée au-delà de l’horizon et les montagnes Pare à l’est. Nous croisons un couple de Suisse avec qui nous échangeons quelques informations, ils sont 255-MARANGU-Kilimandjaro.JPGchargés de la diffusion des Azalaï en Suisse et organisent des voyages en Afrique. Nous continuons de rouler et nous commençons à distinguer le cône du Kilimandjaro, perdu dans les nuages, du moins devinons-nous sa base. Nous arrêtons pour la nuit au terrain de camping de l’hôtel Marangu. Des randonneurs allemands, contents d’avoir fait l’ascension se montrent bruyants en avalant des bières. Nous nous en offrons une aussi, une Kilimandjaro bien entendu ! De la pelouse de l’hôtel nous avons vue sur le sommet du volcan qui, pour notre plus grand plaisir, se dégage petit à petit, et rosit dans le soleil couchant avant de disparaître définitivement dans la nuit. Le menu du restaurant étant aussi appétissant que celui de la veille, nous regagnons notre camion.

 

Lundi 8 octobre : Les douches sont chaudes, nous en profitons avant de repartir. Nous contournons sur une bonne route récente le Kilimandjaro disparu dans les nuages. La terre, rouge, sur le versant est est très fertile, tout y pousse en abondance, principalement les bananiers, les villages sont fréquents agrémentés de jacarandas, de tulipiers du Gabon et bien sûr de bougainvillées. Dans la portion nord, lorsque nous longeons la frontière du Kenya, le paysage change, d’incongrues forêts de résineux poussent sur les collines de piémont, les villages de maisons en planches sont plus rares, les habitants débroussaillent ou défrichent des parcelles. Plus loin, alors que la piste a remplacé le goudron, nous entrons sur des terres masaï, Les hommes, d’un autre temps, se tiennent debout sur une jambe, appuyés sur un bâton ou une lance, surveillant leurs troupeaux, toujours vêtus de pagnes et262-RONGAI-Masai.JPG couvertures dans les tons rouge, les lobes des oreilles percés, allongés par le poids des bijoux qu’ils y accrochent, parfois des cadenas ! Les femmes ont le crâne rasé et portent de nombreux colliers rigoureusement circulaires et des boucles d’oreille en métal blanc. Elles sont de corvée de fourrage qu’elles transportent sur leur dos en énormes ballots le long de la route. Une zone de savane non cultivée ni habitée doit permettre aux éléphants du parc Amboseli au Kenya de rejoindre celui du Kilimandjaro mais nous n’en verrons aucun ni même nulle trace de leur passage. A l’Ouest, nous retrouvons des terres brunes plantées en maïs, sans plus de végétation. Je constate que l’appareil photo réparé fonctionne mal, tous les clichés sont très surexposés ! C’est ensuite la route principale jusqu’à Arusha, la grande ville et sa circulation anarchique, sans nom de rues, sans repères. Nous en sommes presque sortis avant de pouvoir nous orienter. Nous plongeons dans les encombrements avant de trouver à la sortie de la ville, dans une zone plus tranquille, le Masaï Camp où nous nous installons pour la nuit. Le bar et le restaurant attenant sont tenus par des Français avec qui je discute en prenant un Coca. Je retrouve Marie au camion puis nous allons au bar. Les Français nous renseignent pour trouver une batterie et faire réparer la climatisation de la voiture. Nous pouvons nous connecter à Internet. Pas de messages, nous en envoyons à Julie et aux Azalaïens puis je fais une demande de visa pour le Rwanda suite à l’information envoyée par Jean-Pierre. Nous dînons au restaurant, crevettes grillées, calamars en beignets et sambos, bons, mais sans plus, avant de nous coucher.

 

Mardi 9 octobre : La douche est chaude mais pas encore de porte, détail… Nous replongeons dans l’enfer automobilistique pour nous garer dans le centre-ville, devant un frigoriste, réparateur de conditionneurs d’air. Le patron est un Indo-Pakistanais, c’est le cas de toutes les boutiques. Le condenseur est démonté, les fuites repérées, brasées puis remontage et remplissage du liquide et présentation de la facture, salée !!! Cela a tout de même pris deux heures qui nous ont laissé le loisir d’observer les Masaï. Ils déambulent en ville dans leur costume traditionnel, chaussés de sandales taillées dans des pneus ou de plus modernes baskets. Ils ne sauraient se montrer sans tenir à la main un téléphone portable du dernier cri ! Nous allons acheter dans une boutique proche des côtes et des steaks plus appétissants que ceux du supermarché. Nous retournons dans le flot qui s’écoule très lentement dans la rue principale. Les véhicules sont principalement des 4x4 pour les « safari » des touristes. Je trouve un marchand de batteries, cette fois c’est un Sikh, et fais l’achat d’une pour nous assurer un fonctionnement correct du réfrigérateur. Encore des billets à sortir ! J’ai dû changer des euros à deux reprises depuis hier soir… Nous repartons pour quelques centaines de mètres jusqu’au parking du supermarché. Avant de refaire un plein de provisions, nous allons déjeuner dans une gargote qui propose des plats thaÏ. Si mon curry de poulet est correct encore que les morceaux de poulets soient minuscules, le Pad Thaï de Marie n’est pas fameux et étrangement sucré. Nous ne trouvons 280-ARUSHA-Masai.JPGpas grand-chose dans les rayons du supermarché et c’est sans doute le dernier avant plusieurs jours. Nous sortons d’Arusha et roulons dans une plaine sombre où ne se voient que des acacias parasols. Des troupeaux, bovins, chèvres, moutons, soulèvent des nuages de poussière, ils sont menés par des bergers masaï. Nous nous arrêtons dans un village où se tient un marché.  Pas trop de difficultés pour prendre en photo les femmes. Avec leur crâne rasé, celles qui ont une dentition en évidence, me font penser à Klaus Kinski dans Dracula… Marie se laisse vendre un collier, des rangées de minuscules perles colorées en rangs concentriques. Nous repartons, cherchons un campsite avant l’entrée du parc Tarangire. Le premier, avec une belle vue sur la plaine et les troupeaux qui rentrent dans les enclos et au loin sur le lac Manyara, a trop augmenté ses prix pour que nous y restions, nous avançons sur la piste du parc jusqu’à un autre camping, aussi cher… Après dîner, j’ai le plaisir de mettre les mains dans le mécanisme des toilettes, une vis s’est desserrée et je dois réparer. Agréable… Par contre le réfrigérateur ne s’arrête plus !

 

Mercredi 10 octobre : Nous essayons de nous lever tôt. A six heures et quart branlebas de combat, petit déjeuner, douche etc… à huit heures nous sommes sur la piste. Et peu après, à l’entrée du parc de Tarangire. Nous devons acquitter un droit d’entrée de 35 $ par personne et le camion, grand privilégié devra verser 40 $ pour cause d’immatriculation étrangère, au lieu des 10000 shillings (6 $). Paiement par carte de crédit… Des petits malins, dans les temps anciens, entraient-ils en soudoyant les gardes ? Nous voici dans le parc. Nous commençons par une grande boucle dans la zone nord qui nous fait traverser une savane en fin de saison sèche, les herbes sont brûlées ou rases, pas de problème de visibilité.320-TARANGIRE-Gnous.JPG Seuls de beaux baobabs ou des acacias parasols se dressent sur la plaine. Très vite nous découvrons d’importants troupeaux de zèbres et de gnous, souvent de concert. Ils se déplacent en longue procession vers un but indéfini. Des phacochères et quelques singes complètent la faune avec des gazelles. Nous approchons ensuite les abords de la rivière Tarangire et nous y trouvons des hordes d’éléphants, aussi importantes que dans le Chobe mais le paysage est très différent, la luminosité est bien moins bonne, les couleurs sont plus ternes, même les éléphants paraissent terreux. Placides, habitués aux 4x4 des touristes, ils se laissent approcher à les291-TARANGIRE-Lionnes.JPG toucher, continuant de détacher l’écorce des arbres avec leurs défenses. Une concentration de véhicules de « safari »  signale la présence de lionnes qui ont dû faire bombance et qui maintenant digèrent… Vautrées sur le dos dans les herbes, on ne les devine qu’au pelage blanc de leur ventre. Parfois, agacée par une mouche, l’une agite une oreille, se retourne et se rendort en se grattant le ventre d’une patte molle. Les mouches tsé tsé sont un problème dans le parc, grosses comme des taons, leurs piqures sont douloureuses, Marie en fait vite l’expérience. Des étendards bleus et noirs indiquent les zones infestées et bientôt nous roulons tout fermé en climatisé. Encore des lionnes en pleine sieste sur les bords de la rivière, une rivière qui n’est plus qu’une suite de mares. Marie aperçoit enfin un LION, un vrai, avec une crinière ! Pas tout près de la piste, dans l’ombre mais enfin elle en a vu un ! Désormais ce sont les léopards et les rhinocéros qu’elle espère… Nous apercevons aussi quelques girafes souvent au frais sous un arbre, peu conscientes qu’au soleil elles seraient plus photogéniques… J’ai de gros problèmes avec l’appareil photo qui ne réalise que des clichés tous surexposés. Une fois de plus, je dois reprendre le vieux Kodak ! Nous déjeunons sans sortir du camion pour cause de mouches tsé tsé, près du terrain d’aviation. Dans l’après-midi, nous allons faire le tour d’une zone de marécage moins peuplée faunistiquement mais nous y voyons tout de même, dans350-TARANGIRE-Kudu.JPG un autre cadre, un échantillon de ce que nous avons vu en grands troupeaux ce matin. Des kudus, des élands du Cap, des outardes, des cobs d’eau, des oies de Gambie et des bandes d’impalas complètent le tableau. Nous revenons en longeant le lit de la rivière par la rive ouest, sur une mauvaise piste de tôle ondulée. Quelques pistes secondaires permettent de faire des incursions sur les bords de la rivière. L’une d’elle aboutit en face de l’arbre sous lequel nous avions vu des lionnes endormies ce matin. Elles se sont déplacées, trois d’entre elles sont désormais couchées dans le sable du lit du ruisseau, à quelques mètres des restes d’un zèbre. Il y a, sur l’autre rive, face à nous, une douzaine de véhicules de touristes. En les observant à la jumelle, je m’aperçois qu’ils observent un point proche de nous et je découvre alors une autre lionne endormie à une dizaine de mètres de nous, sous un arbre ! Un peu plus loin des troupeaux d’éléphants sont venus se rafraîchir dans les mares. Une belle lumière dore maintenant la savane et les pelages des zèbres et des gnous.  Nous nous dirigeons vers la sortie, escortés par d’immenses troupeaux d’animaux. Nous revenons vite au goudron et roulons alors rapidement jusqu’à Makuyuni où je refais un plein de gasoil. Faute de campsite nous poursuivons encore une trentaine de kilomètres jusqu’à Mto we Mbu. Il fait nuit et dans les phares de la voiture nous distinguons, surgies de l’obscurité, deux girafes figées sur le bord de la route. Nous trouvons le camping cherché, déjà fréquenté par des groupes de touristes  et pour qui une troupe folklorique vient chanter les louanges des bwanas… Nous sommes fatigués, assoiffés et pressés de nous coucher. Je m’aperçois que la batterie neuve n’a pas résolu le problème, elle est déchargée une heure après l’arrêt ! Je ne sais plus quoi en penser…

 

Jeudi 11 octobre : Nous nous levons un peu plus tard, le temps de nous doucher, de nous préparer, de refaire le plein des réservoirs d’eau, il est presque dix heures quand nous prenons la piste du lac Natron. Elle longe les montagnes du Ndorongoro, traverse une 370-MTO-WE-MBU-Village.JPGplaine d’herbes jaunies parcourue par des troupeaux que gardent des pâtres masaÏ, souvent des enfants. Les adultes dégingandés, appuyés nonchalamment sur leurs bâtons, regardent passer les rares véhicules. Un camion-bus est surchargé dans la benne de passagers entassés sur deux niveaux, surtout des femmes bigarrées. Nous doublons des convois d’ânes qui se rendent, escortés par des femmes, au marché d’Engaruka, dernier hameau avant le lac Natron. Les femmes déchargent leurs ânes, se rincent de la poussière du chemin dans le ruisseau boueux et accessoirement en boivent l’eau. Certaines portent une curieuse coiffe tronconique formée de rangs de minuscules perles blanches. Elles se laissent prendre en photo sans trop réagir,388-ENGAREKU-MasaI.JPG les hommes sont plus réticents. Cent mètres plus loin, au centre du village, se tient un marché, pauvre marché mais très coloré et qui me rappelle ceux du Sahel, du nord du Burkina-Fasso en particulier. Je m’offre un Coca Cola que je refroidis avec des glaçons puis après avoir acquitté un droit de passage dans le district, nous continuons sur une piste avec des passages de sable pulvérulent. Le cône presque parfait du volcan Ol Doinyo Lengaï se dégage doucement des nuages et nous sert de repère. Nous le contournons en traversant des coulées de lave, soulevant des nuages de poussière noire. Nous devons encore payer un droit de passage dans un nouveau district.406-OL-DOINYO-LENGAI-Volcan.JPG Les communautés villageoises ont pris modèle sur les parcs nationaux et font cracher un maximum aux touristes qui s’égarent chez eux. Après 20 $ à Engaruka, 40 $ au pied du volcan, nous devrons encore verser 50 $ à l’arrivée au lac ! Son bleu opale miroite sous le soleil mais des nuages nous suivent et quand nous parvenons au camping sur une colline à quelque distance de la rive, le vent s’est levé, la pluie s’annonce et le lac disparaît dans la poussière. Plus question d’en approcher. Nous nous installons sur la pelouse, à côté des tentes montées pour un groupe de touristes français. Nous passons le reste de l’après-midi sous le chaume de la salle de restaurant en plein air à mettre à jour ce texte, les photos, tout en surveillant le lavage du linge dont se charge un jeune quémandeur. Deux groupes de Français dorment sous la tente au camping. L’un d’eux, une famille au grand complet, de bons vivants chaleureux, a la gentillesse de nous proposer de les aider à finir les bouteilles d’apéritif qu’ils ne remporteront pas en France. Le rhum-coca délie les langues et nous parlons de notre voyage. L’autre, des Niçois plus traditionnels, nous raconte la traversée du Serengeti. Nous regagnons notre camion pour dîner.

 

Vendredi 12 octobre : Au réveil, le soleil est revenu au-dessus du lac bien que les sommets qui l’entourent accrochent les nuages. Nous quittons le campement en disant adieu aux Français et nous nous rendons avec Joseph, un jeune MasaÏ qui va nous servir de guide, au bureau du village où, contre paiement de 20 $, on nous autorise à approcher du lac… Nous prenons une piste qui s’en rapproche, le terrain devient plus gras et nous nous arrêtons sur la terre noire, salée, nauséabonde, couverte des traces des flamants, à422-LAC-NATRON-Flamands.JPG quelques mètres de la berge, avant les zones plus meubles. Nous tentons de les voir de près mais ils s’éloignent au fur et à mesure de notre avancée. Ils sont des centaines, peut-être des milliers répartis tout autour du lac. La densité est importante mais tout de même moins que je ne l’avais espéré. Marie reste assise sur le sol à m’attendre tandis que je continue avec Joseph le long de la limite des eaux mais le sol est de plus en plus glissant et mou. A chaque pas j’émets un bruit de ventouse et je manque partir en dérapage à plusieurs reprises… Les îlots du lac s’y reflètent, les flamants défilent comme à la parade en caquetant, désapprobateurs de notre présence. Joseph en agitant son bâton de berger, indice, avec son grand pagne bleu, de son passage dans la classe d’âge des moranes, tente de faire s’envoler les palmipèdes qui n’en ont guère envie… Nous repartons et suivons la piste qui suit les bords du lac quelques instants puis s’en éloigne en grimpant dans la rocaille sur un plateau. Ce qui nous permet de constater 436-LAC-NATRON-Euphorbes.JPGque le lac est loin d’être en pleine eau, de grandes étendues sont à découvert. La piste serpente, pas trop mauvaise, dans les montagnes, passe au milieu de superbes euphorbes de toutes tailles. Le ciel est désormais couvert, quelques flaques témoignent de pluies récentes, les flancs des collines sont verdoyants, les euphorbes commencent à fleurir. Après Wasso, la piste devient plus mauvaise, ravinée, disparue aux traversées de ruisseaux mais nous parvenons à 16 h au poste de garde du Serengeti de Klein’s gate. Nous devons payer l’entrée, 50 $ par jour et par personne, 40 $ pour la voiture par jour et enfin 30 $ par personne et par nuit pour avoir le droit de camper, soit au total 400 $ pour deux jours ! Dès le poste franchi, la faune est là ! A croire que les animaux connaissent les limites du parc. Des centaines de zèbres et de gnous mêlés broutent la tendre herbe fraîche. Des éléphants sont en vue, un troupeau occupe les 446-SERENGETI-Elephants.JPGberges d’un ruisseau, ils sont d’un noir luisant après s’être trempés dans la boue des berges. Plus loin ce sont de gracieuses girafes qui nous regardent passer. Et puis encore des buffles, des damalisques et bien sûr les impalas aux fesses barrées de traits noirs. Nous avons voulu monter vers le poste de garde au nord pour essayer de voir des gnous, en cours de migration, traverser la rivière mais nous n’avons pas de plan du parc et nous ne savons pas exactement où nous sommes. Et puis la faune se fait un peu plus rare. Après avoir atteint le poste de garde du nord où un garde armé d’une Kalachnikov est incapable de nous trouver une carte ni même de comprendre la demande, nous revenons sur nos pas par la même piste. La nuit tombe juste quand nous arrivons au sommet d’une butte rocheuse, au terrain de camping, bien grand nom pour une pelouse occupée par campeurs et un bloc sanitaire élémentaire squatté par des chauves-souris. Je m’y rends et comprends bien vite qu’il est à éviter de nuit, un buffle rumine à une centaine de mètres et peut-être d’autres visiteurs sont-ils tapis dans les herbes… Un accompagnateur d’un groupe m’avertit que l’on ne doit pas rouler en dehors des pistes et que j’ai été pris en photo dans le Tarangire quand nous avions approché des berges de la rivière pour voir les lionnes ! Sympathique !

 

Samedi 13 octobre : Soleil au lever. Les buffles paissent sur la pelouse et se moquent de notre présence. Nous tentons d’aller au lodge pour y acheter une carte du parc mais le cerbère ne nous laisse pas entrer, nous ne sommes pas clients… Restes d’éducation traditionnelle britannique, on ne mélange pas les torchons avec les serviettes… Nous repartons mécontents mais vite consolés par la vision des nombreux troupeaux de zèbres, de gnous, d’impalas qui paissent l’herbe verte des douces collines du Serengeti. Nous partons sur des pistes secondaires, sans trop savoir où elles aboutissent, contrôlant 449-SERENGETI-Zebres.JPGvaguement à la boussole la direction suivie. Quelques girafes, des antilopes damalisques, de vilains babouins et de petites gazelles dik-dik traversent la piste, nous leur cédons bien volontiers le passage. Notre circuit nous ramène involontairement au campement de cette nuit. Nous en redescendons en croisant un troupeau d’éléphants. La piste principale n’est pas très bonne, grosse tôle ondulée sur laquelle nous ne pouvons pas rouler vite et d’ailleurs nous n’en avons pas envie. La faune se fait plus rare, la plaine est moins verdoyante et peu boisée dans certaines zones. Nous bifurquons pour nous rendre à la mare aux hippopotames. Rare lieu où nous pouvons descendre de voiture pour aller contempler la baignade des monstres marins. Ils s’entassent à plusieurs dizaines, dans une mare bien insuffisante et ne pouvant s’y immerger complétement, ils s’aspergent en permanence en grognant. Des bulles nauséabondes viennent crever à la surface et vicier l’air. Nous repartons après déjeuner, passons devant d’autres mares dans la rivière, toutes également surpeuplées. Enfin nous arrivons, sous un orage, à Seronera. Nous y trouvons le Visitor’s Center qui bien sûr, ne peut nous fournir une carte du parc ni ne peut nous indiquer où trouver des lions mais se charge de nous trouver moyennant finance un pisteur… Nous trouvons une carte à la boutique et fort des indications d’un guide, nous partons à la recherche des lions. On ne peut les473-SERENGETI-Lion.JPG manquer, à condition d’être sur la bonne piste. Il suffit de repérer la concentration de 4x4 avec toit soulevé, occupés par des touristes, appareils photos braqués dans la même direction. Nous apercevons ainsi un premier groupe de lionnes, couchées dans les herbes, repérées aux ventres blancs de celles qui dorment sur le dos. Parfois, l’une relève la tête avant de basculer sur l’autre flanc et se rendormir. Dure vie que celle des lions… Quelques centaines de mètres plus loin, nous trouvons un lion, peu visible dans les fourrés, endormi à côté du fruit de sa dernière chasse, un buffle ou un hippopotame, grosse masse sombre ensanglantée. Des vautours et un marabout sont perchés sur les arbres alentour, attendant patiemment le moment où ils pourront participer au festin. Nous continuons cette piste qui longe un ruisseau, dépassant une girafe au pelage sombre, mouillé par la pluie. Nous repassons devant le lieu du crime. Le présumé coupable daigne relever la tête et nous présenter une belle crinière avant de se recoucher. Les lionnes ne sont pas sorties de leur léthargie… Une autre piste, toujours le long d’un ruisseau nous permet d’apercevoir des lionceaux qui jouent comme des chiots dans les buissons. Il fait de plus en plus sombre, la pluie redouble, nous prenons le chemin du campement prévu pour cette nuit. Il est mieux aménagé que le précédent mais le bloc sanitaire est éloigné du parking où nous devons stationner, interdit de pelouse que nous sommes.

 

 

Dimanche 14 octobre : Nous nous levons avec le jour. Zèbres et girafes peuplent les sous-bois qui entourent le campement. A sept heures et demie nous sommes sur la route. La plaine derrière les installations de Seronara est occupée par des troupeaux de gazelles, de zèbres, de gnous, de buffles, de girafes, une arche de Noé ! Nous nous dirigeons sur des pistes boueuses des pluies de la veille vers les köpjes, ces monticules de rochers arrondis qui se voient de loin dans la plaine et qui sont supposés être le refuge des lions et des léopards. Nous parcourons des dizaines de kilomètres sur des pistes de mauvaise tôle ondulée pour, consciencieusement, en faire le tour, en courant le risque de nous embourber sans en voir la moindre queue… Le paysage de prairies verdoyantes piquetées de massifs de rochers n’est pas déplaisant mais les a489-SERENGETI-Kopjes.JPGnimaux sont rares. Nous apercevons tout de même, petite consolation, deux hyènes dans les herbes Nous grimpons en compagnie de touristes italiens sur un de ces köpjes pour avoir une vue sur la plaine. D’autres gros rochers ronds sont posés en équilibre, certains sont marqués par les traces laissées par des galets qui, en les frappant, émettent des sons presque cristallins. En revenant vers le nord, une concentration de 4x4 arrêtés nous indique la présence d’un félin. Effectivement, Loué soit le Seigneur qui a entendu mes prières, un léopard est couché sur la branche d’un arbre. Il a hissé son butin, une impala, sur492-SERENGETI-Leopard.JPG la branche supérieure et maintenant il plastronne, certain de garder pour lui seul sa proie. Marie est aux anges ! Plus loin, une autre hyène se désaltère à une flaque d’eau de la piste. Le temps a passé, nous devons sérieusement penser à nous diriger vers la porte de sortie, très éloignée. Après être repassés sur la piste où nous avions vu des lions la veille, sans les retrouver, nous nous dirigeons vers l’ouest et je roule à vive allure sur une piste heureusement bonne. Cette partie du Serengeti est particulièrement verdoyante et nous retrouvons des troupeaux 506-SERENGETI-Babouins.JPGimmenses de gnous et de zèbres auxquels se joignent différentes espèces de gazelles et des cynocéphales velus. Nous trouvons, à l’ombre d’un arbre, un guépard, plus intéressé par un éventuel gibier que par nous. Un dernier troupeau d’éléphants et nous sommes à la sortie du Serengeti. Nous retrouvons le goudron et des averses de pluie qui lavent superficiellement la voiture. Nous envisageons de nous arrêter aussitôt dans un campement mais l’absence d’internet et l’heure précoce nous incitent à continuer jusqu’à Mwanza. Nous sommes dans un autre monde, fini l’Afrique de Karen Blixen, les fiers Masaï et le jardin d’Eden, nous revoilà dans une Afrique plus réelle. Les villages, maisons de briques ou de parpaings avec des toits de tôles ou de chaume, sont misérables, les marchés bruyants mais sans grande variété de produits. Les orages n’améliorent pas la perception que nous en avons… Mais c’est une Afrique animée, pleine de vitalité. L’arrivée à Mwanza renforce cette vision, un fouillis de marchés, d’enseignes dynamiques, d’offres d’un pseudo rêve de modernité et de richesse, au milieu de la boue, des détritus, de baraques plus proches du bidonville que du « Home, sweet home ». Nous traversons la ville, son centre sans charme à cette heure, et trouvons un campement sur la pelouse du Yacht Club, donc sur les bords du lac Victoria. Nous y sommes en compagnie d’un couple d’Allemands qui, comme nous, ont envoyé leur Kombi Westphalia au Cap et depuis parcourent l’Afrique de l’Est. Je profite des installations sanitaires, pas vraiment au niveau d’un supposé Yacht Club, pour essayer d’être digne d’en faire très provisoirement partie. Nous dînons au restaurant du Club, seuls clients, sur la terrasse en bordure du lac. Filets de tilapia arrosés d’une bouteille de ce Sauvignon blanc, inoubliable depuis Le Cap, le « Two Ocean ».

 

Lundi 15 octobre : Dans la nuit, aboiements désespérés de chiens puis le calme revient. La lac est paisible, le soleil timide. Nous quittons notre Yacht Club et allons nous garer dans le centre, à côté de l’inévitable Clock Tower de toute ville d’une ancienne colonie britannique. Nous passons dans un cybercafé lire nos messages, Julie, de plus en plus motarde, Joseph avec des points de chute à Kampala et à Djibouti. Nous leur répondons. Un message des autorités rwandaises nous autorise à rentre à partir du 18 ce qui ne fait pas notre affaire, nous aviserons à la frontière… Nous allons ensuite nous garer puis nous promener dans le quartier populaire où mosquées et temples indiens voisinent avec des509-MWANZA-Marche-et-temple.JPG immeubles laids et modernes au goût local, qui écrasent de leur prétention les baraques sans étage à toit de tôle rouillé. Il n’est pas étonnant de croiser des femmes en sari et d’autres voilées jusqu’aux yeux, sans parler des africaines en boubou, défrisées, tous appâts bien provoquants. Nous allons traîner au marché, classique, rien de spécial, la ménagère fait ses achats pour la maison, houspille ses gosses, le gandin lorgne les godasses usagées, d’autres cherchent la bonne affaire, décochent des œillades aux gazelles égarées, les portefaix transportent des charges inhumaines sur leur dos ou dans des carrioles à deux roues, à la largeur calculée pour passer au ras des étals et tant pis pour les piétons distraits. Les odeurs de légumes et fruits pourris se mêlent à celles des épices, un camion-benne est embourbé dans les immondices, les sonos crachent des musiques inaudibles, un marché africain… Nous n’achetons qu’un ananas et des mangues puis nous reprenons la voiture et partons à la recherche de l’unique supermarché de la ville. Dans un hangar, un entassement de produits importés ou locaux susceptibles de satisfaire les besoins élémentaires des expatriés et de la bourgeoisie locale occidentalisée… Viande surgelée (à plusieurs reprises sans doute), bières et spiritueux, glaces, moutarde et mayonnaise anglaises, etc… Nous complétons nos achats avec quelques fruits  et repartons nous garer au port où nous attendons le ferry qui doit nous faire traverser le golfe de Mwanza. Les abords du lac sont un dépotoir où des oiseaux marabout 510-MWANZA-Lac-Victoria.JPGempêtrés dans leurs ailes de géant, piquent du bec dans les ordures. Enfin nous montons sur une grosse péniche de débarquement avec des bus antédiluviens et une voiture flambant neuve, immatriculée en Afrique du sud, proclamant sur ses portières que Jesus live… Nous apercevons alors la ville depuis le lac, plantée sur des entassements de gros rochers qui descendent jusqu’au bord de l’eau. Trois quarts d’heure plus tard, nous débarquons sur l’autre rive, déception, pas de goudron mais une piste assez bonne mais interminable avant de retrouver un bon asphalte. Nous traversons une région très verdoyante, cultivée, les villages paraissent moins minables que la veille, peut-être à cause du soleil…Champs de maïs, rizières à sec et beau manguiers. Et puis le bon goudron laisse la place à une piste d’abord assez bonne pour rouler très vite, puis elle se gâte, est en travaux et enfin redevient très roulante alors que nous quittons la plaine pour nous élever dans des collines. Enfin nous retrouvons un large macadam et le gros bourg de Biharamulo. Nous cherchons le Boma, l’ancien centre administratif allemand, perché sur une colline. Pour le trouver, nous devons questionner tous les mâles en âge de répondre à une question en anglais… Nous débouchons dans la cour de cette quasi forteresse, guest house à l’abandon où on ne fait aucune difficulté pour nous laisser nous installer et utiliser des sanitaires. Soulagés d’avoir un lieu où dormir au calme, nous fêtons notre arrivée en ouvrant la bouteille de Sauvignon d’Afrique du Sud achetée ce matin en guise d’apéritif.

 

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